Marseille : débats constructifs pour la Journée nationale de la relation avocats- magistrats, Les nouvelles Publications, 26 janvier 2024

Marseille : débats constructifs pour la Journée nationale de la relation avocats- magistrats, Les nouvelles Publications, 26 janvier 2024.

Après quelques jours de vives tensions, les magistrats et les avocats marseillais ont échangé à cœur ouvert sur leurs relations, à l'occasion d’une Journée nationale consacrée à ce thème. Explications.

Le barreau de Marseille et le tribunal judiciaire de Marseille ont répondu présents à la première édition de la Journée nationale de la relation avocats-magistrats. Sur les recommandations du Conseil consultatif conjoint de déontologie de la relation magistrats-avocats (CCC), un colloque a ainsi été organisé à la Maison du barreau, le 21 mars, sur le thème : l’accès au magistrat. Une date qui ne doit rien au hasard puisqu’elle marque les 220 ans de la promulgation du Code civil.

Les relations entre les magistrats et les avocats ne sont pas vraiment au beau fixe, en général, depuis quelques années. A Marseille, la situation a atteint son paroxysme le 5 mars dernier lors de l’audition d’Isabelle Couderc, vice-présidente chargée de l’instruction au tribunal judiciaire de Marseille et coordinatrice du pôle criminalité organisée de la Jirs, devant la commission d’enquête sénatoriale sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier. Une audition durant laquelle elle a eu des mots très durs à l’encontre des avocats. Elle s’était notamment agacée du comportement de « certains avocats qui utilisent carrément des stratagèmes pour, au final, obtenir des remises en liberté des délinquants ». Des propos qui ont fait bondir le bâtonnier et déclencher une guerre ouverte.

La hache semble à nouveau enterrée avec la présence d’Olivier Leurent, président du tribunal judiciaire, de Nicolas Bessone, procureur de la République, et de Mathieu Jacquier, côte à côte, pour ouvrir les débats de cette première édition de la Journée nationale de la relation avocats-magistrats. Mais les paroles ne trompent pas.

« Nous sommes là pour réapprendre à parler. C’est une construction que nous devons bâtir pour demain », lance Mathieu Jacquier.

Même volonté de rapprochement du côté d’Olivier Leurent : « il ne peut y avoir de justice de qualité sans une relation avocats-magistrats de qualité ». L’espoir d’un monde meilleur est là : « nous sommes en train de dépasser la période de turbulences. Nous sommes des individus de bonne volonté et nous portons tous une robe noire ».

Debout devant un public de professionnels du droit venus en nombre, ils ont introduit les débats avant de se répartir au sein de deux tables-rondes (table-ronde pénale, table-ronde civile), organisées en même temps. Avec une consigne de taille : la parole doit être libre. Force est de constater que le mot d’ordre a bien été suivi, notamment durant la table-ronde pénale, où les intervenants ont souhaité s’exprimer à cœur ouvert.

« Les débats devant la commission sénatoriale vous ont vexés, mais ils ont surtout pointé du doigt certaines pratiques, notamment celles d’avocats parisiens, pourquoi acceptez-vous ce type de comportement dans vos rangs ? », questionne, notamment, Audrey Jouaneton, première vice- procureure de la République près le tribunal judiciaire de Marseille. Même sentiment de la part des avocats, « ce sont des pratiques qui n’ont rien à faire dans l’exercice de la profession, mais elles sont heureusement très rares et complètement étrangères au contrôle de la régularité de la procédure par l'avocat », précise Xavier Pizarro, avocat à Marseille.

Il a beaucoup été question également de problèmes inhérents à la justice, manque de moyens, de temps et un travail sous pression pour les magistrats. L’organisation de la justice avec plusieurs sites répartis dans la ville a aussi été mise en avant. Tout comme le télétravail qui ne permet pas toujours de répondre aux appels téléphoniques des justiciables ou des avocats...

Parmi les pistes d’action envisagées pour pacifier les relations entre magistrats et avocats, figure la nécessité de plus se parler, de favoriser les rencontres et les échanges : dans le Palais, lors d’événements communs, un peu avant les audiences, par exemple. Aussi bien du côté des magistrats

que des avocats, l’utilisation intempestive des ordinateurs et des téléphones portables a été pointée du doigt. « Parler devant une personne qui ne nous regarde à aucun moment est assez déstabilisant et un peu méprisant », lance un avocat dans la salle.

Comme dans toutes les relations humaines, les règles de bon sens ont enfin été rappelées : bienveillance, écoute, respect, professionnalisme. D’ores et déjà les protagonistes se sont donnés rendez-vous pour la deuxième édition de la Journée nationale de la relation avocats-magistrats.

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